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Dans le secret des Compagnonnages

Dans le secret des Compagnonnages

AU SOMMAIRE...

 

Origines légendaires et figures tutélaires
Symboles, savoirs du bâtisseur et Art du Trait
Rituels initiatiques et héritage hermétique
Les Compagnons du Devoir, héritiers et rénovateurs


Les Compagnonnages français et européens – ces fraternités d'ouvriers itinérants dans les métiers du bois, de la pierre ou du métal – ont de tout temps cultivé un héritage initiatique. À l’instar d’autres sociétés initiatiques, ils possèdent leurs propres rites et symboles, transmis au fil des générations, qui suscitent la curiosité du profane. Bien que discrets plutôt que véritablement secrets, et sans visée politique autre que l’amour du travail bien fait et la transmission d’une morale ouvrière, les Compagnons partagent une culture riche et très codifiée. Leur tradition ésotérique est vivante et ancrée dans la matière, héritage de ce que l'on connait aujourd'hui sous le nom des Compagnons du Devoir. Exploration.

Origines légendaires et figures tutélaires

Dès le 16ème siècle en France, ces confréries d’ouvriers (appelées jadis Devoirs) se revendiquent d’origines prestigieuses et mythiques pour affermir leur identité. Chaque rite compagnonnique se place ainsi sous le patronage d’un ancêtre légendaire : le roi Salomon (constructeur du Temple de Jérusalem, assisté de l’architecte Hiram), Maître Jacques (sage bâtisseur originaire de Gaule dans la légende) ou le Père Soubise (compagnon moine aux origines plus mystérieuses). Les compagnons se désignent encore comme Enfants de Salomon, Enfants de Maître Jacques ou Enfants du Père Soubise, selon la filiation symbolique qu’ils revendiquent. En réalité, ces récits fondateurs ne prennent forme qu’assez tardivement (au18ème – 19ème siècle), mais ils donnent aux compagnonnages le sentiment d’un passé glorieux remontant à la construction du Temple de Salomon. Les épisodes de la vie et de la mort de ces ancêtres mythiques servent de modèles : ils sont évoqués comme des figures tutélaires guidant le jeune compagnon dans les valeurs de son Devoir. La tradition veut que chaque compagnon du Devoir accomplisse au moins une fois dans sa vie le pèlerinage à l’ermitage de Sainte-Baume en Provence – tombeau supposé de Maître Jacques – en mémoire de ce fondateur martyrisé. De même, Marie-Madeleine (réputée retirée à la Sainte-Baume) est honorée comme sainte patronne des compagnons, symbole du rôle spirituel dévolu à la femme dans cette fraternité. Ces invocations et références constantes aux ancêtres compagnons ancrent la communauté dans une chaîne initiatique ininterrompue, distincte dans son esprit de celle des loges maçonniques, et plus proche d’un ésotérisme artisanal vivifié par la légende et le sacré chrétien traditionnel.

Malgré ces liens symboliques avec la Bible ou les croisades (on a parfois assimilé Maître Jacques au dernier grand maître templier Jacques de Molay, ou rapproché Soubise des moines cisterciens qui enseignèrent l’art géométrique aux bâtisseurs), les compagnonnages demeurent profondément attachés à la matière et au métier plutôt qu'à la foi. Le Compagnon se veut l’héritier d’une culture ouvrière qui exprime, à travers les monuments qu’il élève, l’effort de l’humanité pour s’élever « du visible vers l’invisible ». Le compagnonnage – qualifié de « chevalerie du métier » – conserve une unité entre le geste de l’artisan et la quête de sens spirituel. C’est pourquoi ses légendes fondatrices, même tardives, restent ancrées dans le concret de la construction : le Temple, la Cathédrale, la loge de chantier (la Cayenne) sont à la fois des réalités matérielles et des idéaux spirituels pour les compagnons. On retrouve ici l’idéal d’une « Ars Magna » du bâtisseur, un Art Royal de la Construction où la maîtrise de la pierre, du bois ou du fer confine au sacré.

Symboles, savoirs du bâtisseur et Art du Trait

La tradition compagnonnique comporte également tout un volet de savoir-faire secrets et de pratiques magico-religieuses liées au chantier. Les bâtisseurs d’antan, formés aux méthodes des anciens depuis le Moyen Âge, entouraient leur métier de précautions symboliques destinées à protéger l’ouvrage et les hommes. On retrouve ainsi dans de nombreux édifices anciens des inscriptions ou marques gravées considérées comme apotropaïques (c’est-à-dire protectrices contre le mal). Assez souvent confondues (volontairement ?) avec les marques purement utilitaires des artisans, ces figures – croix, pentagrammes, roues ou entrelacs – étaient en fait destinées à écarter les influences maléfiques et à placer la construction sous de bons auspices. Il n’est pas rare d’observer sur les poutres d’une charpente ou le linteau d’une porte des rosaces tracées au compas (roues à six pétales dites « daisy wheels »), des séries de V conjoints ou de M entremêlés (monogrammes mariaux pour invoquer la Vierge), des nœuds sans fin, ou encore de petites croix gravées dans la pierre – autant de symboles que nos ancêtres pensaient efficaces pour conjurer les mauvais esprits en scellant magiquement le lieu. Ces pratiques de « marquage » rituel prolongent une tradition fort ancienne : dès la Rome antique et le Moyen Âge, clous de fondation et dépôts de première pierre accompagnent les constructions pour les lier symboliquement au sol et appeler la protection divine sur l’édifice. Les compagnons du Tour de France, grands bâtisseurs de cathédrales et de demeures, ont perpétué à leur manière cet héritage magique du constructeur en dissimulant dans l’ouvrage, ou à sa surface, des formules de bénédiction, signes cabalistiques ou emblèmes. Nombre de pierres taillées des cathédrales gothiques portent ainsi des signes lapidaires – lettres, chiffres ou dessins géométriques – laissés par les tailleurs de pierre. Officiellement, ces marques servaient à identifier le travail de chaque ouvrier ou à orienter le montage. Mais leur forme récurrente et leur ressemblance avec des symboles ésotériques suggèrent qu’elles pouvaient aussi remplir une fonction talismanique aux yeux des ouvriers médiévaux. L’esprit du chantier était donc complet : on « scellait » un sort favorable dans la maçonnerie tout comme l’on scelle une pierre d’angle.

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Source

Au-delà de ces protections inscrites dans la matière, les compagnons possédaient surtout un trésor de savoir jalousement gardé : l’Art du Trait. Il s’agit de la science géométrique appliquée à la taille de la pierre, la charpente et la forge, qui permet de concevoir les pièces et volumes d’une construction avec une précision quasi miraculeuse. Ne vous êtes-vous jamais demandé, en visitant un monument ancien, comment cet édifice a pu résister aux siècles, ou comment même a-t-il pu être construit sans nos technologies actuelles ? Cet art du trait – comprenant l’usage savant du trait (ligne), du cercle et des proportions harmoniques – était autrefois enseigné dans le plus grand secret aux apprentis méritants. Depuis le 16ème siècle, il se transmettait par deux canaux : d’une part les traités écrits de maîtres architectes (à commencer par le Premier tome de l’architecture de Philibert Delorme en 1567), et d’autre part l’enseignement oral prodigué lors des cours du soir que les compagnons suivaient au gré de leur Tour de France. Par ce moyen, des connaissances pointues en géométrie descriptive (stéréotomie, tracés de voûtes et charpentes) ont pu se perpétuer à l’abri du regard des profanes. Les compagnons charpentiers et tailleurs de pierre tenaient cet Art du Trait en très haute estime, le considérant comme le cœur de la transmission de leurs savoirs. Maîtriser la science du trait, c’était en quelque sorte percer les secrets de la Forme que recèle la nature – un savoir conférant du pouvoir sur la matière brute, presque assimilable à de la magie pour qui ne le détenait pas. De fait, l’art de la géométrie sacrée enseigné par les compagnons relie étroitement la construction et le sacré. Tracer une figure parfaite sur l’épure, élever une voûte selon le nombre d’or ou orienter une église selon les astres, tout cela relevait à la fois de la technique et du rite. Les compagnons médiévaux, dit-on, avaient reçu des moines bâtisseurs le secret des proportions mystiques et des plans symboliques, hérités des temples antiques et de l’ésotérisme gréco-romain. Il n’est pas étonnant que plus tard certains auteurs ésotéristes aient vu en eux les dépositaires d’une antique Tradition hermétique : ainsi Fulcanelli, au début du 20ème siècle, interprétera les sculptures des cathédrales gothiques comme un véritable livre d’alchimie écrit par les compagnons-bâtisseurs du Moyen Âge. Sans forcément adhérer à toutes ces lectures occultes, on constate que les symboles universels ne manquent pas dans l’iconographie compagnonnique : l’Équerre et le Compas croisés (emblèmes majeurs rappelant l’union du matériel et du spirituel), le Niveau et la Balance (renvoyant à l’égalité et à la justice), ou encore des motifs empruntés à l’Antiquité et à la Bible comme le Labyrinthe ou la Tour de Babel, qui ornent encore fièrement leurs tableaux et leurs rubans d’alliance. Tous ces symboles, transmis en interne aux compagnons, forment un langage secret compris d’eux seuls, suscitant l’imagination et l’étude bien plus qu’une simple parole ne le ferait.

Rituels initiatiques et héritage hermétique

En tant que société initiatique, le compagnonnage recrute et élève ses membres à travers des rites de passage riches en symbolisme. Du statut de jeune aspirant jusqu’à celui de compagnon reçu, le candidat traverse plusieurs épreuves et cérémonies où se mêlent enseignements moraux, scénographie sacrée et parfois des éléments d’hermétisme et d’alchimie spirituelle. Le déroulement traditionnel comprend généralement trois étapes initiatiques : l’adoption de l’apprenti (qui marque son entrée dans la famille compagnonnique), la réception du compagnon au sein de son corps de métier, puis à l’issue de sa carrière la reconnaissance du compagnon « fini » (devenue symbolique de nos jours). Chacune de ces étapes est accompagnée de rituels codifiés et de paroles sacramentelles, parfois jusqu'à être considérés par l’Église comme une parodie de ses propres sacrements (ainsi la Sorbonne condamna en 1655 les pratiques compagnonniques jugées trop proches de cérémonies religieuses).

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Labyrinthe et Tour de Babel. Source

Lors de la cérémonie d’adoption de l’apprenti (appelé alors aspirant), celui-ci prête serment sur un texte sacré et reçoit les couleurs de la société – un ruban ou écharpe aux couleurs de son métier, frappé des marques symboliques de celui-ci. Parmi ces symboles figurent notamment deux images clés de sa démarche spirituelle : le Labyrinthe et la Tour de Babel. Le labyrinthe, emprunté aux mythes antiques (Dédale en Crète) et présent au sol de cathédrales comme Chartres, évoque le long cheminement intérieur vers la lumière, la progression ardue du candidat à travers les épreuves initiatiques. Le parcours labyrinthique, que les anciens compagnons pouvaient réaliser symboliquement à genoux en priant, représente l’humilité et la persévérance requises pour atteindre la perfection – une forme de pèlerinage allégorique vers Jérusalem céleste. À l’inverse, la tour de Babel rappelle l’orgueil du bâtisseur : elle figure les succès précoces dont on pourrait être trop fier, et met en garde contre la vanité, puisque la tour biblique s’écroula inachevée. Pour le jeune compagnon, prendre conscience de la Babel en lui, c’est accepter qu’il lui reste bien des progrès à faire et que seule l’humilité permettra d’élever un jour une œuvre achevée. Ainsi, dès le premier rite, le postulant est invité à « ouvrir les yeux sur la réalité du mal » en lui et autour de lui, et à comprendre que la vraie fraternité n’unit pas des êtres parfaits mais des hommes de bonne volonté s’entraidant pour se dégager des ruines de l’ignorance et de l’égoïsme. On le voit, l’enseignement dispensé est à la fois moral et allégorique, dans la lignée de la mystique chrétienne médiévale et de l’ésotérisme occidental.

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Rite de la guilbrette, serment d'alliance. Source

La réception du compagnon constitue le point culminant de l’initiation. Elle se déroule généralement lors d’une cérémonie nocturne, à huis clos, autour d’une table dressée qui symbolise l’autel (les quatre pieds de la table figurant les quatre évangélistes, le pain et le vin évoquant le corps du Christ, selon certaines descriptions). Le récipiendaire, après avoir effectué des « voyages » symboliques, prête un serment solennel sur un Volume sacré (Bible) et reçoit de nouveau ses couleurs, marquées cette fois de nouveaux symboles initiatiques propres à son nouveau grade. Dans le Rite du Devoir (les Enfants de Maître Jacques), les emblèmes traditionnellement remis au compagnon reçu sont la Pyramide, le Temple, le Tombeau et la Cathédrale. La Pyramide, premier symbole, représente la perfection de la croissance vivante, qui de la base au sommet s’accomplit en une synthèse – l’évocation est clairement alchimique, rappelant l’ascension progressive de la matière vers l’esprit, et renfermant « le secret de son édification » (allusion au Grand Œuvre intérieur). Le Temple, second symbole, renvoie bien sûr au Temple de Salomon : c’est la loge (Cayenne) où les compagnons se réunissent, mais c’est aussi l’image du sanctuaire intérieur que chacun doit bâtir en lui-même en suivant la règle (l’Équerre) et la sagesse (le Compas). Le Tombeau, troisième symbole, invite le compagnon à méditer sur la mort : « il faut savoir mourir », disent les anciens rites, c’est-à-dire mourir à son ignorance et à son orgueil pour renaître régénéré. Le compagnon est ainsi encouragé à réaliser de son vivant une œuvre de qualité – son propre tombeau – comme s’il façonnait par son travail la pierre tombale qui attestera de sa valeur. Cette idée rejoint les thèmes hermétiques de la mort initiatique et de la putréfaction alchimique qui précèdent la renaissance de l’initié. Enfin, la Cathédrale, quatrième symbole, représente l’aboutissement : c’est l’expression de la fécondité du travail et du sacrifice, la perfection de l’œuvre achevée. Elle symbolise surtout l’union du Ciel et de la Terre, de la main et de la pensée. En elle se résout la dualité entre spirituel et matériel – une idée au cœur de l’hermétisme, où l’Œuvre alchimique vise à marier les principes opposés (soufre et mercure, esprit et corps) pour obtenir la pierre philosophale. Avec la Cathédrale, le compagnon accède à la notion même de Chef-d’œuvre : non seulement la réalisation techniquement parfaite, fruit de l’amour du métier, mais aussi le reflet de son âme et de son accomplissement moral. Le Chef-d’œuvre, qu’il devra tôt ou tard exécuter, sera à la fois la preuve de sa maîtrise artisanale et l’expression tangible de l’initié transformé – l’équivalent de la pierre philosophale du compagnon, en quelque sorte.

Les Compagnons du Devoir, héritiers et rénovateurs

L’organisation connue aujourd’hui sous le nom de Compagnons du Devoir est l’héritière directe des anciens Devoirs qui structuraient, depuis le Moyen Âge, les confréries d’ouvriers itinérants. Ces Devoirs étaient donc au nombre de trois : les Enfants de Maître Jacques, les Enfants du Père Soubise et les Enfants de Salomon. Chacun possédait ses légendes fondatrices, ses rites de réception et ses emblèmes, mais tous partageaient un même idéal : faire du métier un chemin d’élévation et de fraternité.

Au 19ème siècle, les compagnonnages traversent une période difficile. Les luttes entre Devoirs rivaux, les interdictions administratives et les bouleversements liés à la Révolution industrielle affaiblissent considérablement le mouvement. C’est alors qu’émerge une figure décisive : Agricol Perdiguier (1805-1875), charpentier gardois, lui-même compagnon reçu sous le nom de « Avignonnais la Vertu ». Dans son Livre du Compagnonnage publié en 1839, il dénonce les rivalités sanglantes qui opposaient encore certains corps de métier et appelle à la réconciliation des différentes branches. Son œuvre influence durablement le mouvement et ouvre la voie à une unification progressive.

Au tournant du 20ème siècle, des compagnons de différents Devoirs se regroupent pour fonder une structure commune qui conserve l’esprit de la tradition mais l’adapte à un monde moderne. De cette volonté naît l’Association ouvrière des Compagnons du Devoir du Tour de France (AOCDTF), officiellement constituée en 1941, qui reprend et rassemble les héritages de Maître Jacques, de Soubise et de Salomon. L’Association se présente alors comme la maison commune des Compagnons, rassemblant sous un même toit des métiers qui autrefois se réclamaient de Devoirs différents.

Ce lien avec l’héritage ancien se lit à plusieurs niveaux. Les Compagnons du Devoir perpétuent le Tour de France, parcours initiatique où l’apprenti devient compagnon en voyageant de ville en ville, logé et guidé par ses aînés. Ils maintiennent aussi la mémoire des figures tutélaires et des récits fondateurs qui structuraient les anciens rites, même si les cérémonies ont évolué pour s’accorder avec l’époque. Enfin, ils conservent l’idéal du chef-d’œuvre, cette réalisation manuelle qui témoigne de la maîtrise d’un métier et symbolise l’achèvement d’un parcours.

À travers l’ensemble de ces rites de passage, on perçoit donc une véritable quête ésotérique propre au compagnonnage traditionnel. Bien qu’elle s’exprime avec des symboles chrétiens ou opératifs (outils, monuments), cette quête rejoint l’universel parcours initiatique : purification de l’impétrant, transmission d’un savoir, mort et renaissance symboliques, conquête de la Lumière. Le compagnonnage peut ainsi être vu comme une école de mystères adaptée au monde du travail manuel. Il réconcilie Homo faber et Homo sapiens, le savoir-faire technique et le savoir-être spirituel, là où la modernité tend à les dissocier. Les Compagnons ont forgé un ésotérisme artisanal unique, qui fait du travail lui-même une mission quasi sacrée. Les compagnons du Devoir perpétuent ce patrimoine rituel. Ils demeurent, selon la belle formule de l’un des leurs, « les héritiers d’une culture ouvrière qui se confond avec le patrimoine spirituel des grandes civilisations », cherchant sans cesse à élever la matière inerte en chef-d’œuvre vivant et à transmettre, par le trait et le compas, la flamme d’une Tradition toujours en éveil.

Olivier d’Aeternum
Par Olivier d’Aeternum

Passionné des traditions ésotériques et de l'histoire de l'occulte des premières civilisations jusqu'au 18ème siècle, je partage quelques articles sur ces sujets. Je suis également co-créateur du magasin ésotérique en ligne Aeternum.

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